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Abraham Lincoln ou la timidité comme arme de persuasion

Il y a quelques années de celà, j'ai eu l'occasion de voir un orateur particulièrement brillant dans un gigantesque auditorium. Très à l'aise, il semblait littéralement fait pour le métier et je me rappelle m'être dit qu'il aurait certainement fait un excellent présentateur télé. Pourtant, malgré le show, je suis ressorti mal à l'aise et je n'étais pas du tout convaincu par le discours. J'ai interrogé d'autres participants et à ma grande surprise, le constat était assez partagé : malgré le charisme évident, on avait tous le sentiment d'avoir assisté à un spectacle destiné uniquement à nous vendre une mauvaise soupe. Curieux, car le fond de la démonstration était bon, la forme paraissait excellente, et pourtant, le résultat très mitigé.

Cet orateur était excellent, mais il commettait une erreur très classique : il était bon, ça se voyait, et ça se voyait trop. Paradoxalement, son talent le faisait apparaitre comme manipulateur (alors même que je suis certain qu'il n'avait aucune intention de l'être). Encore une fois, les hommes politiques sont les 1iers à avoir perçu ce problème et à l'avoir réglé. La technique date de l'antiquité mais un de ses adeptes les plus célèbres est Abraham Lincoln.

Comme les sénateurs romain, Lincoln avait compris le danger d'apparaitre comme trop sûr de lui même, trop à l'aise. Mais en même temps, peut-on suivre un leader qui doute de ce qu'il propose ? La technique Dubitatio consiste à démarrer son discours de façon humble, presque timide, un peu mal à l'aise. Le cerveau de l'audience interprète ça comme une absence de menace et commence à avoir de l'empathie pour l'orateur (on adresse le personnal agenda dans l'équation de la confiance, concept que je développerai ultérieurement). La technique doit être utilisée pendant un laps de temps assez court, de l'ordre d'une minute, guère plus. Au delà, vous êtes catalogués comme peu sûr de vous et votre humilité est passé de qualité à grave défaut.

Si on écoute, juste d'un point de vue sonore, un discours d'Hitler, il utilise rigoureusement la même technique : il démarre assez doucement, puis monte le son (jusqu'à finir par hurler, mais bon, c'est un autre sujet). Plus proche de nous, un Obama, ou bien n'importe quel candidat à la présidentielle française, sont des cas très intéressants à observer, qu'il s'agisse d'un discours dans un meeting, ou bien d'une intervention télévisée : on démarre doucement, puis rapidement, on monte le son.

Démarrer son discours en étant un peu mal à l'aise n'est donc pas un problème, bien au contraire. La timidité peut être un atout, à condition qu'elle soit de courte durée. Démarrant en douceur puis prenant de l'assurance rapidement, vous inspirez de la confiance à votre audience. Vous gommez ainsi que côté "trop à l'aise pour être honnête" qu'une présentation trop bien huilée va inspirer. La technique peut atteindre de très hauts degrés de sophistication. Ainsi, Steve Jobs, encore lui, présentait généralement ses nouveaux produits par 3, le chiffre magique. Mais le plus important, est que chaque produit devait être plus intense et surprenant que le précédent. Lorsque l'Iphone est présenté au public, c'est la dernière nouveauté, et c'est la plus bluffante du MacWorld. Evidemment, cela sous entend qu'il faut être capable d'organiser sa présentation avec cette méthode en tête, et cela demande énormément de travail (et Steve Jobs était un maître en la matière). Mais l'impact est colossal.

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